mercredi 15 avril 2009

De qui parler - et à qui?

J'ai commencé ce blog pour parler à mes amis thérapeutes.
Mes clients le découvrent aussi et certains le lisent avec assiduité.
En fait on ne peut s'adresser aux thérapeutes sans s'adresser aux clients - aux miens et aux leurs.
Dans le modèle de thérapie d'Acceptation et d'Engagement, nous cultivons l'égalité profonde avec nos clients.
Je me demande pourtant si je dois parler d'eux et d'elles, partager ici au quotidien ce que m'inspirent leurs souffrances, leur courage souvent, leur confiance toujours.
J'hésite et je me demande si, même en prenant soin de faire en sorte qu'ils et elles ne puissent être identifiés que par eux-mêmes, je ne trahirais pas la qualité unique de notre relation.
Pas facile et, de fait, je ne l'ai fait jusqu'ici qu'une seule fois - en rendant mon client totalement méconnaissable.
A ce propos, l'écrivain-thérapeute existentialiste américain Irvin Yalom ecrit dans The Gift of Therapy - an Open Letter to a New Generation of Therapists and Their Patients - (Le Cadeau de la Thérapie - une Lettre Ouverte à une Nouvelle Génération de Thérapeutes et leurs Patients):
Depuis l'instant où j'ai écrit sur des histoires de patients dans un livre (Le Bourreau de l'Amour) il y a de nombreuses années, je me suis imaginé que les nouveaux patients qui me consulteraient pourraient s'inquiéter que j'écrive sur eux. J'ai donc rassuré mes patients sur la confidentialité, les assurant que je n'ai jamais écrit sur des patients sans auparavabt obtenir la permission ni sans profondément déguiser leur identité. Mais avec le temps j'ai observé que les soucis des patients étaient bien différents - en général ils s'inquiètaient moins qu'on puisse écrire sur eux que du fait qu'ils puissent ne pas être assez interessant pour être séléctionnés.
Traduction Benjamin Schoendorff (image Rémi Schoendorff)

1 commentaire:

Annie GRUYER a dit…

Cher Benjamin,

Je relève cette dernière phrase qui m'a interpelé :
"ils s'inquiètaient moins qu'on puisse écrire sur eux que du fait qu'ils puissent ne pas être assez interessant pour être séléctionnés."

Et j'apporterai juste un autre éclairage. Je remplacerai le mot
"intéressant" par "UTILE".

Les personnes en souffrance psychologiques, notamment, ont tout aussi besoin pour progresser non seulement d'avoir en face d'eux des thérapeutes efficaces donc utiles mais aussi d'ETRE eux-mêmes utiles dans l'alliance thérapeutique et en dehors.

L'exemple que je connais le mieux est celui de notre association Médiagora où donner et aussi important et même plus que recevoir. Quoi de meilleur pour retrouver, ou souvent, enfin trouver l'estime de soi si vitale que d'apporter, à son tour, son aide, son expérience, son expertise, sa bienveillance à d'autres personnes peut-être plus en souffrance et moins informées ?

Passer de la dépendance (drogues dans les addictions, tiers- personnes dans les cas sévères d'agoraphobie, de phobie sociale ou de toc....)à l'essor de déployer enfin ses ailes et s'envoler vers la liberté par la thérapie mais aussi le partage et l'entraide. Redevenir acteur- citoyen, terme qui met cher.

Et je terminerai par cet bel après-midi de printemps en fredonnant un joli texte d'une chanson de Julien Clerc : je veux être utile à vivre et à rêver.

Amicalement
Annie