Steven Hayes, initiateur de la Thérapie d'Acceptation et d'Engagement (ACT) vient de publier ce très beau texte sur son blog.
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Nous avons tous un enfant à l’intérieur – l’enfant que nous avons été. Souvent les souffrances les plus dures à porter aujourd’hui remontent à loin. La manière dont nous vivons nos relations avec cette partie de nous est un bon modèle de la manière dont nous pouvons avancer avec la souffrance que nous rencontrons dans nos vies d’adultes.
Le cœur de la Thérapie d’Acceptation et d’Engagement (ACT) peut se résumer à six mots : acceptation, défusion, soi, maintenant, valeurs, et action. Presque tous les livres sur l’ACT parcourent ces processus. Mais nous pouvons nous en faire une idée plus rapidement en pensant à cet enfant intérieur.
Imaginez-vous enfant, au moment ou vous avez ressenti pour la première fois une souffrance que vous ressentez aujourd’hui.
L’acceptation c’est prendre votre histoire comme elle est… comme vous prendriez un enfant dans vos bras. La partie de nous qui a de la compassion ne giflerait pas cet enfant parce qu'il ressent de la peur ou de la tristesse – et pourtant, adultes, nous nous faisons trop souvent l’équivalent fonctionnel.
La défusion, c’est moins rentrer dans notre blabla évaluateur… comme bercer un enfant qui nous raconte comment on l’a moqué dans la cour de récréation. Nous savons instinctivement que ce qui compte, ça ne sont pas les arguments logiques que nous pourrions opposer aux moqueries. Il est plus important de se sentir tenu – et pourtant, adultes, nous vivons nos vies à l’intérieur de ces arguments, à lutter pour avoir raison.
Un sens de soi transcendant nous permet de voir, à travers les formes externes, la conscience intérieure… comme nous nous émerveillons de reconnaître l’étincelle de conscience derrière les yeux d’un enfant totalement réceptif. Nous ne prendrions pas les idées qu’un enfant à sur lui-même pour ce qu’il est vraiment, et pourtant,adultes, nous construisons ces conceptions de notre moi et en faisons des structures égotiques gigantesques que nous défendons becs et ongles, et auxquelles nous cedons le contrôle de notre vie.
Le moment présent c’est être capable d’observer avec flexibilité, de regarder le monde avec l’esprit ouvert. Une partie de ce qui nous attire chez les enfants, c’est la façon dont parfois ils nous font revenir à l’instant présent, et nous voyons dans leur vitalité et leurs jeux un peu de la joie qui du présent. Et pourtant, adultes, nous dérivons bien souvent vers nos compulsions ou nous laissons absorber par nous-mêmes.
Les valeurs et l’action engagée concernent prendre votre vie en main et ce qui est important pour vous dans la vie… comme créer de l’espace pour que cet enfant joue et grandisse, en sachant que les choses adultes à prendre en charge sont prises en charge sans exiger que l’enfant arrête de jouer et grandisse sur le champ.
Une participante à la liste de discussion ACT for the Public qui lutte avec la dépression à écrit récemment sur son passage dans un refuge pour enfants délaissés. Solitaire et abandonnée, elle racontait comment on l’avait forcée à manger quelque chose que la directrice savait la rendrait malade, puis enfermée dans un placard pour la nuit quand elle avait vomi. Son histoire était tellement triste, mais aussi, pleine de mots de jugement sur cette petite fille.
J’ai écrit en réponse d’utiliser son attitude envers cette enfant comme guide. Bien que le contenu diffère d’une personne à l’autre, les questions que je me suis trouvé à poser sont je pense plus généralement applicables, je vais donc les répéter ici. Je lui ai demandé de penser à sa relation avec cette petite fille intérieure et ai demandé :
"Sans acceptation, est-ce que vous lui dites d’arrêter d’avoir peur ou d’être faible ?
Sans défusion est-ce que vous lui dites de se taire et faire semblant ?
Sans un sens de soi transcendant, est-ce que vous lui dites qu’elle ne vaut peut-être pas mieux que la façon dont on la traite ?
Sans attention flexible au moment présent, est-ce que vous l’ignorez ou la regardez fixement comme un objet endommagé ?
Sans valeurs, est-ce que vous lui dites que c’est à elle de faire en sorte que tous les adultes se sentent en sécurité, plutôt que le contraire ?
Sans action engagée, est-ce que vous lui dites de prendre seule soin d’elle alors même qu'elle a besoin que l’on prenne soin d’elle?"
Quand nous faisons des choses malsaines, nous nous éloignons de l’enfant intérieur. Quand le chien noir de la dépression est nourri, l’enfant intérieur est terrifié. Quand l’histoire à propos de l’aliénation s’épaissit, l’enfant intérieur est abandonné. Quand la colère est tournée vers l’intérieur, l’enfant intérieur devient aussi une cible.
Depuis la perspective ACT, la seule façon d’écouter, respecter, aimer, et laisser jouer et grandir la partie enfant de nous, c’est que la partie adulte choisisse une voie de vitalité et de compassion pour soi, qui reconnaisse la souffrance tout en la portant en avant vers une vie qui vaille le coup d'être vécue. Il est parfois dur de trouver la place pour faire cela pour nous-mêmes. Si c’est comme ça, il y a une alternative. Imaginez-vous enfant, au moment ou vous avez ressenti pour la première fois une blessure que vous ressentez aujourd’hui.
Faites-le pour cet enfant.
Steven C. Hayes , University of Nevada, auteur de Get Out of Your Mind and Into Your Life
(traduction Benjamin Schoendorff - image Rémi Schoendorff)
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Il y a 6 ans
2 commentaires:
Cher Benji,
Très émue par ce texte émanant de Steeve Hayes.
C'est une très belle représentation d'ACT. Tout y est dit.
La métaphore est puissante et tellement éclairante.
Ce qu'il y a de plus triste à l'âge adulte chez beaucoup d'entre nous, c'est d'oublier dans un fichu placard sombre l'enfant que nous avons été et qui pourrait tant nous apporter.
Nous lui devons pourtant beaucoup et surtout nous avons des comptes à lui rendre par rapport à tous les espoirs, les idéaux, les rêves qu'il fondait en nous quand nous serions devenus "grands".
Il faut le remercier et se battre pour toute l'énergie qu'il nous a inssufflé de sa sagesse de petit homme et de petite femme.
Bonjour Benjamin,
Je ne sais si ton éditeur sera partant pour les illustrations que tu me demandes mais, en lisant ce texte, ça a été un bel écho à des pages que j'ai fait il y a peu pour une sorte de jeu à Angoulême. j'avais,avant d'avoir le sujet décidé d'un petit théâtre et aussi d'un propos, celui d'aller consoler moi-même l'enfant que j'ai été… les pages sont là
http://www.24hdelabandedessinee.com/public/auteurs2009.php?id=9519
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