mercredi 30 septembre 2009

Ce que la vie chuchote sous les cris de la souffrance

Quand l’acceptation n’est plus simplement tolérer nos émotions difficiles, quand elle devient intérêt véritable pour la totalité de notre expérience intérieure, et consentement profond à laisser la vie nous prodiguer tous ses enseignements, la fonction de nos émotions, de nos pensées et de nos souvenirs change alors radicalement.
Les émotions sont des échos de notre passé. Elles sont porteuses de sens, mais d’un sens qui est chuchoté, et qui est souvent recouvert par les cris de nos envies de leur résister et de nos jugements. Ce vacarme est tel qu’il nous empêche d’apprendre.
En observant nos envies et nos jugements sans nous y soumettre, nous nous donnons une chance de reconnaître qu’ils sont des productions automatiques de notre esprit sur lesquelles nous n’avons pas prise. Regardez si vous pouvez adopter une attitude d’ouverture et d’intérêt pour toutes les émotions qui se présentent - non dans l’espoir secret de les voir retomber ou se transformer, observez les plutôt comme vous observeriez des vagues qui vont et qui viennent. Où se manifestent-elles dans votre corps ? Quelles pensées, images ou jugements se présentent avec elles ? Quelles envies ou ‘besoins’ montent alors en vous ? Que voyez-vous autour de vous ? Quel impact ont-elles sur vos relations ?
Puis regardez si vous pouvez les ‘retourner’ et voir ce qui se trouve de l’autre côté. Quelles valeurs les sous-tendent ? Ce qui n’a pas d’importance pour nous ne peut nous faire souffrir. Qu’est-ce qui devrait ne plus avoir d’importance pour vous pour que telle émotion ne vous fasse plus souffrir ? Suivez la piste de votre douleur comme on retrace son chemin à l’aide de petits cailloux. Y trouvez-vous de vieux souvenirs, de vielles blessures, d’anciennes aspirations ? Il y a beaucoup à apprendre.
En choisissant d’adopter cette position, même les émotions douloureuses deviennent nos alliées – et ce serait une perte incalculable de les repousser artificiellement. Un peu comme si nous choisissions de ‘résoudre’ le problème d’être témoin de la misère et de la discrimination en nous crevant les yeux et les tympans. Ça ‘marcherait’ peut-être, mais au prix de notre capacité à nous soucier du sort de notre prochain. Le coût en serait si élevé que la ‘cure’ serait pire que la douleur que nous cherchions à éliminer.
Avec notre souffrance c’est pareil, à la différence près que nous ne savons pas de quoi elle nous parle. Cela seule la vie qui peut nous l’apprendre – et elle nous l’apprend en chuchotant plutôt qu’en criant.
Steven C. Hayes (Traduction et adaptation Benjamin Schoendorff; image Rémi Schoendorff)

lundi 28 septembre 2009

Chercher à se faire rasssurer ?

Dans le message que j’ai posté hier, Steven Hayes proposait un exercice permettant d’avancer avec sa peur d’être jugé. Dans la discussion sur la liste ACT for the public qui avait suivi sa suggestion, la contribution de Joanne Steinwachs, autre thérapeute ACT m’a semblé intéressante car elle illustre un principe important de le Thérapie d’Acceptation et d’Engagement. Ce principe c’est que ce n’est pas la forme de ce que l’on fait - en l’occurrence les mots que l’on dit aux autres - qui importe, mais la manière dont cela fonctionne pour soi et dans sa vie, c’est à dire ce que nous appelons la fonction du comportement.
Je voudrais qualifier ce qu’a écrit Steven Hayes. Dans le dialogue que vous engagez après avoir expérimenté un nouveau comportement, préparez-vous à toute sorte de résultat et à observer sans jugement tout ce qui vous vient.
Par exemple, même si vous avez dit clairement à votre ami(e) que vous ne vouliez pas être rassuré(e), vous pourrez peut-être apercevoir que vous cherchez quand même à vous faire rassurer. Ou simplement êtes en quête d’un signe que votre ami(e) vous a compris. Mais il est tout aussi possible qu’il(elle) ne ‘comprenne’ pas – après tout, tout le monde ne parle pas de cette façon ! Alors soyez aussi prêt(e) à ça. Trop en dire aux autres peut également les pousser à chercher à vous rassurer. Préparez-vous simplement à observer avec compassion toutes ces choses vous venir à l'esprit. Souvenez-vous quand vous choisissez de vous exposer à une de vos peurs que vous avez une large palette de choix de ce que vous pouvez dire aux autres – y compris le choix d’en dire très peu ou même rien du tout.
Puis observez simplement votre esprit et ce qui vous vient. Parfois il peut même être plus utile de donner le minimum d’explication, de rester dans l’ambigüité et de faire un peu de place à la peur de ‘ce qu’ils vont penser’ – surtout si vous avez tendance à trop vous expliquer aux autres, si c’est là une de vos façons d’éviter, ou si vous cherchez activement que les autres vous rassurent. Regardez votre esprit qui cherche à se faire rassurer, observez votre envie de convaincre l’autre (que vous faites quelque chose de raisonnable, de compréhensible, d’acceptable…). Si ce que vous faites ensuite est de vous soumettre à ce que votre esprit vous impose, regardez si vous pouvez recontacter votre véritable objectif, votre valeur, être fidèle à vous même.
Ce travail commence par un choix personnel d’avancer. Il ne s’agit pas de se mettre en mode confessionnal, comme dans certains groupes de développement personnel où ‘tout’ révéler de soi permet de se sentir intégré.
Fiez-vous plutôt à votre propre expérience et à ce qui fonctionne pour vous à la lumière de votre expérience. Soyez flexibles, curieux et ouvert et continuez à observer tout ce qui se présente à vous.
Joanne Steinwachs (traduction et adaptation Benjamin Schoendorff; image Rémi Schoendorff)

La peur d’être jugé

Une particularité de nos obstacles psychologiques, c’est qu’ils cherchent tous à nous convaincre qu’ils sont des obstacles réels et insurmontables. Ces obstacles sont bien réels. Et il n’y a pas besoin de les surmonter pour avancer.
Un obstacle souvent rencontré est la peur d’être jugé. Cette peur est parfois si intense qu’elle peut nous rendre muets et faire que nous nous isolons, même quand nous sommes entourés. Cette peur vient rarement seule. Avec elle viennent la gêne, la honte, l’envie de fuir, et mille pensées qui se collent à nous et nous condamnent.
Devrions-nous nous rassurer ou nous faire rassurer ? Mais notre esprit ne connait pas de repos et il ne sera pas rassasié par de simples assurances que nous ne sommes pas jugés. Il en voudra sans cesse plus, et celles qu’il obtiendra perdront vite de leur efficacité. Steven Hayes, l'initiateur de la Thérapie d’Acceptation et d’Engagement propose une autre voie :
Recevoir des assurances – des autres ou de vous-même - que vous n’êtes pas jugé ne va pas vous aider. Vous n’avez pas non plus à conclure que vous êtes jugé… Ce qui peut vous être bien plus utile c’est d’apprendre à vivre à l’intérieur de cette ambigüité. Ça veut dire laisser votre esprit exiger de savoir si vous êtes ou non jugé…
Essayez de trouver des opportunités de révéler un peu plus de vous. Par exemple vous pouvez dire à un(e) ami(e)quelque chose que vous ne diriez pas habituellement puis lui dire qu’habituellement vous ne diriez une telle chose car vous avez peur du jugement des autres et que du coup vous vous cachez et vous sentez isolé. Mais que vous vous êtes rendu compte que plus vous essayez de contrôler la façon dont les autres vous perçoivent, plus il vous est difficile d’être vous-même avec les personnes qui comptent pour vous. Vous pouvez alors dire que vous avez choisi de sortir de votre coquille et de regarder ce qu’il advenait du souci que votre esprit se fait de ces jugements. Dites enfin que vous ne dites pas cela pour qu’on vous rassure, mais simplement pour faire savoir à votre ami(e) que cela avait été un obstacle pour vous et que vous avez choisi d’avancer.
Puis prenez un peu de temps pour observer de près comment vont et viennent votre peur, les jugements sur vous-même et votre honte ; et accueillez tout cela avec attention et compassion pour vous-même.
Un des enseignements de l’ACT est que nous pouvons nous éloigner du champ de bataille qu’est notre esprit – sans plus chercher à ce que les ‘bons’ gagnent ni même à mettre un terme à la bataille. Nous pouvons simplement laisser notre esprit faire ce qu’il fait (comparer, juger, évaluer, condamner, spéculer, batailler, etc.…) comme il le fait et choisir d’avancer – avec douceur et bienveillance.
Benjamin Schoendorff (image Rémi Schoendorff)

dimanche 27 septembre 2009

Rester ou partir?

C’est une question qui peut devenir lancinante et sembler insoluble quand les relations intimes deviennent difficiles.
Voici comment Russ Harris, un thérapeute et formateur de Thérapie d’Acceptation et d’Engagement australien dont le livre Le piège du bonheur paraitra en français en 2010, aborde cette question avec ses clients :
Pour les clients qui se retrouvent face à ce dilemme - rester ou partir – je trouve qu’il est utile de souligner qu’il est en fait impossible de ne pas choisir. Chaque jour où vous ne partez pas, vous choisissez de rester. La question devient alors que choisissez-vous d’incarner pendant ce jour où vous restez ? Quel genre de jour vivrez-vous si vous choisissez de le vivre englué dans l’histoire ‘dois-je partir ou rester’ ? Et si, un jour, vous choisissez de partir, que voudrez-vous incarner en partant ?
Il est souvent utile, pour les clients qui sont fusionnés avec ces histoires de ‘Est-ce que je devrais/Est-ce que je ne devrais pas’, de les inviter à mettre un peu de temps de côté chaque jour pour vivre à l’intérieur de leur histoire. On peut ainsi prendre un peu de temps chaque jour pour réfléchir aux avantages et inconvénients de sa relation. Et le reste de la journée, on peut s’entrainer à pratiquer reconnaître et observer cette histoire quand elle se présente. On peut alors choisir de la laisser aller et venir plutôt que s’y laisser prendre. Quand elle apparaît et qu’elle se colle on peut alors dire : Tiens, Je viens de me laisser attraper par l’histoire ‘Partir ou rester’. Et choisir de continuer à incarner, dans le moment présent et à travers ses actions, les valeurs qui sont importantes.
Benjamin Schoendorff (image Rémi Schoendorff)

samedi 26 septembre 2009

Lutter contre nos pensées et nos émotions les renforce

Sur le site e-santé.fr, le docteur Catherine Solano présente Faire face à la souffrance et la Thérapie d'Acceptation et d'Engagement :
Lutter contre nos pensées et nos émotions les renforce. 
Benjamin Schoendorff nous invite à considérer ce paradoxe à l'aide d'une métaphore : 'Imaginez que vous êtes sur une île entourée de requins, sur une trappe au-dessus de l'eau. Un appareil ultra-sensible enregistre le niveau de votre anxiété. Pour mieux vous motiver, au moindre signe de peur, la trappe s'ouvrira et vous finirez en hamburger pour requins. Combien de temps pensez-vous pouvoir tenir ? Tout le monde répond 'très peu de temps'. En fait, vous êtes déjà branché sur l'appareil le plus sensible de la création : votre système nerveux.'

Lire la suite de cet article sur le site e-santé.fr

Catherine Solano (image par JoeyIsNotOK, Deviant Art)

vendredi 25 septembre 2009

Cultiver la tranquillité d'esprit

Sur le blog de John Forsyth:

La tranquillité d’esprit. Nous la voulons tous. Peu d’entre nous l’obtienne, et quand nous l’obtenons, elle n’est souvent que passagère. Je pense que la raison en a à voir avec la façon dont nous concevons la ‘paix de l’esprit’. Ce n’est pas quelque chose que nous pouvons avoir et tenir, mais c’est certainement quelque chose que nous pouvons apprendre à cultiver et permettre de se développer.
Comment pouvons-nous faire ça ? Voici quelques pas.
  1. Accordez-vous du temps pour simplement vous asseoir, sans distractions, sans rien à faire, sans nulle part où aller.
  2. Prenez ce temps pour vous-même et observez avec curiosité votre esprit et votre expérience, tels qu’ils sont dans l’instant. Observez votre expérience et tout ce qui se passe entre vos deux oreilles et dans votre cœur. Il n’y a rien à faire, aucun état particulier à atteindre. Pratiquez simplement être exactement là où vous êtes, exactement comme vous êtes.
  3. Observez votre envie de changer votre expérience ou d’arrêter et passer à autre chose. Ce sont les signes que votre histoire ancienne pointe le nez, avec les veilles habitudes d’essayer de changer votre esprit ou votre corps. Ces habitudes sont le carburant de la lutte. En pratiquant simplement les observer en tant que pensées, envies, et reliques du passé, « Tiens un bout de mon histoire !... Et voici une pensée de… », vous interrompez la programmation ancienne et la désamorcez.
  4. Si cela vous aide vous pouvez inspirer chaque instant de curiosité avec l’intention de simplement observer tout cela et d’être en paix. En faisant cela, vous pouvez observer puis laisser repartir avec chaque inspiration et chaque expiration.
Continuez à pratiquer aussi longtemps que vous le souhaitez avec l’intention d’être présent à votre esprit et à votre corps tels qu’ils sont, là où vous êtes, sans les combattre, sans lutter avec. Quand vous faites cela vous pratiquez la paix et la bienveillance pour vous-même. C’est une habileté qui deviendra plus automatique avec le temps et la pratique et que vous pouvez pratiquer où que vous vous trouviez.
Souvenez-vous que la tranquillité d’esprit n’est pas quelque chose que nous ayons, c’est le choix de déposer les armes et de cesser de combattre nos propres expériences. Cela peut vous aider à vous donner la présence et la clarté de considérer ce que vous aimeriez faire, ce que vous aimeriez devenir, ce que vous voudriez pouvoir incarner dans cette vie.
Pratiquez la tranquillité d’esprit et observez ce qui se passe avec le temps. Faites-le par choix.
De tout cœur,
John P. Forsyth, auteur de Mindfulness and Acceptance Workbook for Anxiety (traduction Benjamin Schoendorff; image Rémi Schoendorff)

jeudi 24 septembre 2009

Un cadeau d'anniversaire rien que pour moi

Sur le blog de Kelly Wilson:

Depuis plusieurs semaines, j’avais un secret. Mon secret c’était le cadeau d’anniversaire que je me préparais. Un cadeau pour moi-même. Rien de bien gros, rien de spectaculaire, vraiment, une chose simple. Un peu comme ces cadeaux que les enfants façonnent… fait de colle, de bâtons de sucette et de papier coloré. Pas vraiment beau, mais fait avec le cœur. Donc mon petit présent que j’ai fait rien que pour moi, c’est un peu de pratique de yoga. J’y travaille environ cinq jours par semaine depuis deux mois. Je ne suis pas bon, mais j’ai persisté et ça a suffisamment pris forme pour que je me l’offre en cadeau pour mon 55ème anniversaire.
Le yoga m’a été précieux, vraiment, et je me suis souvent surpris à sourire en m’appliquant à tel ou tel étirement. Je l’aime d’une façon différente que j’ai pu aimer tout autre forme d’exercice physique que j’ai pratiqué. C’est bon. Je passe beaucoup de temps à travailler avec des mots et avoir un endroit où lâcher prise des mots est bon. Je passe beaucoup de temps à enseigner et avoir un endroit pour lâcher prise du rôle d’enseignant est bon. Je passe beaucoup de temps à « progresser » et c’est bon d’avoir un endroit où lâcher prise des progrès. Au cours de mes 55 années, j’ai passé de longues périodes à négliger mon corps (comme si lui et moi n’étions pas dans le même bateau). Avoir un endroit pour lâcher prise de la négligence et retomber dans le soin attentif est bon.
C’est bon de prendre le temps de s’étirer et de respirer, et de prendre du temps pour pratiquer, et d’offrir ce petit cadeau à moi-même. Aujourd’hui, en ce jour particulier, je ne me sens pas le mériter, et je me le suis offert quand même parce que cette chose là, ce petit présent, n’a pas à voir avec le mérite. Et, après avoir passé l’essentiel de ma journée intranquille… je suis allé ce soir et ai respiré, et me suis étiré, et j’étais reconnaissant de mon petit cadeau… bâtons de sucette, colle, papier coloré et tout.
Kelly Wilson (traduction Benjamin Schoendorff; image Studio 4496 Deviantart.com)

mercredi 23 septembre 2009

La souffrance, notre alliée ?

Une des plus profondes leçons de la Thérapie d'Acceptation et d'Engagement est que, loin d'être notre ennemie, notre souffrance peut se révéler notre alliée la plus précieuse sur le chemin de la vie.
Elle peut nous aider à reconnaitre nos valeurs et les directions dans lesquelles nous voulons avancer.
Si l'on nous enlève quelque chose qui ne compte pas pour nous, nous n'en souffrons pas. Si au contraire, cette chose est importante, alors la souffrance nous envahit. Seul ce qui est important peut nous faire souffrir.
Ainsi si nous souffrons de notre peur des autres, c'est un signe que la connexion aux autres est importante pour nous. S'ajoute à la souffrance que nous cause notre peur, la souffrance de l'absence de connexion.
Parfois la souffrance est telle que notre esprit va habilement chercher à nous convaincre que ce qui nous fait tant souffrir n'est pas vraiment important pour nous. Mais même quand nous 'achetons' cette idée qu'il nous vend, nous pouvons sentir, au plus profond de nous, que quelque chose ne va pas, et que notre vie se rétrécit.
Ainsi nous pouvons acheter la pensée qu'avoir des relations proches n'est 'pas vraiment' important pour nous. En observant, grâce à la pleine conscience, la qualité de notre expérience quand nous achetons de telles pensées, nous pouvons apercevoir la perte de vitalité que cet achat implique - et que c'est nous qui payons.
Et la souffrance ne s'en va pas, témoin fidèle de l'importance de cette absence pour nous.
Et si nous accueillions la souffrance comme une alliée qui nous montre le chemin et conserve, au plus profond de l'obscurité, la trace indélébile et lumineuse de ce qui est important pour nous?
Benjamin Schoendorff (image Rémi Schoendorff)

mardi 22 septembre 2009

Connaitre sa souffrance

Nous sommes tous familiers avec nos 'grosses' souffrances. Quand elles se présentent, elles ne se laissent pas ignorer.
Et si nous apprenions à mieux connaitre les petites souffrances de la vie ?
Il y a beaucoup à apprendre à observer les petits inconforts physiques, les moments d'ennui, de frustration et tous nos petits soucis.
Observer quand ils arrivent; et les sensations, émotions et pensées qui arrivent avec.
Observer ce que nous faisons pour les repousser ou nous en débarrasser.
Observer notre soulagement quand elles s'éloignent - et observer que ce soulagement, lui aussi, passe.
C'est ce que Gregory Kramer nous invite à faire dans Insight Dialogue, the interpersonal path to freedom.
Benjamin Schoendorff (image Rémi Schoendorff)

lundi 21 septembre 2009

La pleine conscience pour accepter

Cultiver sa capacité d'observation, c'est à dire ses habiletés de pleine conscience, est une des clés de l'acceptation.
Face à une expérience intérieure intensément aversive: peur, tristesse, colère, etc., notre réaction automatique va être de chercher à fuir. Plus que la chose qui nous cause cette expérience, c'est l'expérience qu'elle nous cause que nous allons à toute force tenter d'éviter - souvent au détriment des actions que nous voudrions entreprendre. Cet évitement expérientiel est à la source de la souffrance psychologique.
L'acceptation c'est le contraire de l'évitement. C'est l'accueil de la totalité de notre expérience.
Mais comment faire pour accueillir ce que esprit nous crie qu'il est inacceptable de vivre et de ressentir ?
La pleine conscience nous montre la voie. En nous entrainant à observer tous les aspects de notre expérience du moment : sensations corporelles, perceptions sensorielles du monde, et productions de notre esprit (ce que nous nous disons, ce qui nous passe par la tête : images et pensées), nous apprenons à nous rapprocher de notre univers intérieur - plutôt que de le fuir. Ainsi nous l'apprivoisons progressivement.
Dans un premier temps, il est plus aisé d'entrainer notre capacité d'observation dans des situations neutres.
Puis, graduellement, à mesure que se renforce notre capacité d'observer et d'accueillir la totalité de notre expérience du moment, nous devenons capables d'approcher certaines des
expériences intérieures que nous cherchions à éviter.
C'est comme un monstre qui, vu de loin, jetterait mille feux effrayants et pousserait des grincements terrorisant en nous menaçant de mille morts si nous approchons d'un pas de plus. L'observation de la totalité de notre expérience du moment pourra nous révéler qu'il est en fait composé milliers de boites de conserve dont l'acier reflète l'éclat du soleil et l'entrechoquement produit le vacarme qui nous terrorisait - et que c'était notre esprit qui produisait la pensée que s'en approcher nous tuerait.
Benjamin Schoendorff (image Rémi Schoendorff)

samedi 19 septembre 2009

La pleine conscience pour choisir

Viktor Frankl encore:
"Entre le stimulus et la réponse, il y a un espace, dans cet espace se trouve notre pouvoir de choisir notre réponse, et dans notre réponse se trouve notre croissance et notre liberté".
Notre histoire d'apprentissage nous a programmé à répondre d'une certaine manière à certaines situations. Certaines de ses réponses - comme l'évitement, la fuite ou la rumination - peuvent nous empêcher de progresser, de grandir, et de choisir la vie que nous voulons vivre.
Ces réponses sont souvent automatiques. C'est comme un système d'autopilote qui, pour éviter les turbulences du moment, inverserait le cap vers lequel se dirigeait l'avion.
Les techniques de pleine conscience peuvent nous apprendre à désautomatiser l'autopilote et à reprendre le contrôle de notre trajectoire - et de notre vie.
Ces techniques nous permettent d'observer notre fonctionnement intérieur sans nous laisser emporter par les pensées et les émotions qui nous viennent dans l'instant. Elles nous permettent de cultiver et d'élargir cet espace entre stimulus et réponse programmée et d'y retrouver le choix.
Quand nous ne sommes pas conscient de la possibilité de cet espace, nous pouvons nous retrouver précipités dans l'attaque de panique, la spirale dépressive, la colère, les comportements ou consommations compulsives. Et y perdre toute possibilité de choix.
La bonne nouvelle c'est que cet espace se cultive - par la pleine conscience.
Paradoxalement, c'est en cessant la lutte contre nos réactions automatiques et en apprenant à accueillir la totalité de notre expérience intérieure du moment présent que cet espace s'ouvre graduellement à nous et que nous développons ce que Frankl appelle notre "liberté de choisir à chaque instant".
Il existe de multiples manières de cultiver la pleine conscience. Il y a les méthodes 'formelles' faites d'exercices où l'on ne fait rien d'autre que cultiver sa capacité d'observation et d'accueil de son expérience et les exercices 'informels' où l'on cultive cette capacité pendant ses activités quotidiennes (marcher, se laver, manger, etc.). Certaines de ces techniques sont exposées dans Faire face à la souffrance, choisir la vie plutôt que la lutte avec la Thérapie d'Acceptation et d'Engagement, d'autres dans Méditer pour ne plus déprimer, la pleine conscience, une méthode pour vivre mieux.
L'apprentissage de l'observation non-réactive de notre expérience peut sembler n'avoir aucun lien avec l'urgence de mettre fin à la souffrance et au cycle des comportements répétitifs qui nous piègent, c'est le contraire qui est vrai.
Et rien ne sert de chercher à vous en convaincre, seule l'expérience peut vous le montrer..

Benjamin Schoendorff
(ce billet et le précédent ont été largement inspirés et adaptés du blog Mindfulness and Pyschotherapy d'Elisha Goldstein PhD; image Rémi Schoendorff)

jeudi 17 septembre 2009

La liberté de choisir à chaque instant

Viktor Frankl, le père de la logothérapie a écrit: “Chaque être humain a la liberté de choisir à chaque instant”.
Pour ceux d’entre nous qui sommes coincés dans la souffrance, sans aucune possibilité de choix apparente, la première pensée qui se présente à la lecture de cette citation peut-être : "facile à dire!”.
Viktor Frankl était un psychiatre viennois interné par les Nazis dans le camp d’Auschwitz. Il a partagé son expérience dans Découvrir un sens à sa vie avec la logothérapie. Dans les semaines précédant la libération du camp par les troupes soviétiques, Frankl avait créé d’un hôpital de fortune où, sans médicaments ni nourriture, il s’occupait de réconforter des prisonniers atteints du typhus. Avec un camarade, ils avaient préparé dans les moindre détail un plan d'évasion. Au jour du grand départ, Frankl fit une dernière visite à ses malades. Il allait bientôt les abandonner à une mort certaine. Mais alors qu’il se trouvait face à un compatriote mourant, il fit un choix :
“Soudain, j’ai pris mon courage à deux mains. Je suis sorti en toute hâte de la baraque et j’ai dit à celui qui m’attendait qu’il m’était impossible de l’accompagner. Sitôt que je l’ai avisé de ma décision irrévocable de rester, j’ai été soulagé. Je ne savais pas ce qu’allaient me réserver les prochains jours ; mais j’avais trouvé une sorte de paix intérieure qui m’avait été inconnue jusqu’alors. »

Au plus profond de la souffrance, Frankl a fait le choix de ne plus chercher à la fuir afin de faire ce qui était important pour lui, soigner son prochain. Et c’est ce choix qui lui a donné un sens de liberté encore jamais ressenti.
C’est le même choix auquel nous faisons tous face : chercher à échapper à notre souffrance, ou le choix de nous tourner et d’avancer vers ce qui est le plus important pour nous. Si un tel choix est possible au plus profond de la machine à tuer Nazie, il est aussi possible à tous ceux et toutes celles d’entre nous qui luttent pour échapper à leur souffrance. C’est ce choix que la thérapie d’Acceptation et d’Engagement peut nous aider à faire.
Benjamin Schoendorff (image DR)

dimanche 13 septembre 2009

Le groupe, meilleure protection bien-être?

Faire partie d’un groupe social actif préserve la santé et le bien-être.

Le professeur Alex Haslam de l’université d’Exeter en Angleterre suggère dans des propos rapportés par l'Independent de Londres qu’avoir une vie sociale offre une meilleure protection contre la perte de mémoire et les effets de l’âge que nombre de médicaments. Dans une étude portant sur plus de 650 victimes d’accident vasculaires cérébraux (AVC), les personnes ayant une vie sociale active avaient moins de problèmes cardiaques, des niveaux de stress moins élevés et des taux de rechutes et de complications moindres.

Alex Haslam observe: “Nous sommes des animaux sociaux et avons évolué pour vivre en groupe. L’appartenance à un groupe, depuis les équipes de foot jusqu’aux clubs de lecture et aux associations de bénévoles, est au centre du bon fonctionnement et du bien-être mental. […] Après 6 semaines de thérapie de groupe à base de jeux, des résidents d’une maison de retraite s’amélioraient de 12% dans des tâches de mémoire. […] On peut dire qu’un des meilleurs médicaments, c’est nous, c’est le groupe social. Quand vous faites la même thérapie en individuel, vous n’obtenez pas la même amélioration. […] Si vous pouviez inventer un médicament qui produise les mêmes effets, vous pourriez le vendre très cher.”

Cet effet a aussi été vérifié chez des groupes de pompiers. “Moins vous vous identifiez avec le groupe, plus il y a de chances que vous ayez des comportements d’évitement. Plus vous vous identifiez, plus il y a de chances que vous retourniez au feu. Les pompiers avec une forte identification au groupe était plus résilients et résistaient mieux au stress que les solitaires.”

Plus encore, une étude faite au moyen d’enregistrements de cameras de surveillance indique que la présence de larges groupes fait diminuer de 88% la probabilité qu’un différend se termine en violence. Alex Haslam souligne que les groupes ont encore souvent mauvaise presse et pourtant “comprendre les déterminants sociaux de la santé peut nous offrir des solutions pratiques et efficaces à de nombreux problèmes de santé publique. Et comparés aux options médicales traditionnelles, ces solutions sont relativement bon marché.”

Benjamin Schoendorff (image Rémi Schoendorff)

samedi 12 septembre 2009

Cultiver la compassion pour soi plutôt que l'estime de soi

Kristin Neff, de l'univeristé du Texas fait des recherches sur la compassion pour soi. Elle définit la compassion pour soi comme composée de trois aspects: la bienveillance envers soi-même, la reconnaissance de son humanité commune et la pleine conscience (c'est à dire l'accueil de la totalité de ses expériences intérieures sans jugement).
Ses recherches suggèrent que la compassion pour soi préserve des effets délétères de l'estime de soi.
Dans un article récent du Journal of Personality elle présente les résultats d'une étude comparative où il apparait que de hauts scores de compassion pour soi sont corrélés à un sentiment de valeur personnelle plus stable et moins dépendant du succès personnel que les scores d'estime de soi. Les personnes ayant plus de compassion pour elles-mêmes se comparaient moins aux autres, étaient moins gênées par le regard des autres, ruminaient moins sur elles-mêmes, avaient moins de colère et moins besoin d'avoir raison. Pour sa part l'estime de soi était corrélée avec de plus hauts scores de narcissisme.
En tant que prédicteur de bonheur, d'humeur positive et d'optimisme, la compassion pour soi ne différait pas de l'estime de soi. Les recherches de Kristin Neff suggèrent que cultiver la compassion pour soi, ce que font toutes les thérapies basées sur la pleine conscience, est une façon plus efficace d'atteindre les objectifs visés par la promotion de l'estime de soi tout en en évitant les écueils.
Qu'un tel sujet soit l'objet de recherches universitaires est remarquable et salutaire.
Benjamin Schoendorff (image Rémi Schoendorff)

jeudi 10 septembre 2009

La pleine conscience contre la dépression

Ce livre de bibliothérapie de Mark Williams, John Teasdale, Zindel Segal et John Kabat-Zinn (préface de Christophe André et CD de méditations guidées par Christophe André) présente le programme de la Thérapie Cognitive Basée sur la Pleine Conscience (MBCT) qui a fait ses preuves dans la prévention de la rechute dépressive sous forme d'un programme progressif et engageant à faire chez soi d'entrainement aux techniques de la méditation de pleine conscience.
Ciblé sur la dépression, Méditer pour ne plus déprimer est bien plus large et contient des techniques et des enseignements salutaires et scientifiquement validés.
Un des moments les plus marquants du développement de la MBCT fut la réalisation par ses créateurs que pour enseigner et en transmettre les bienfaits il fallait soi-même pratiquer et s'être profondément familiariser avec les territoires nouveaux des états méditatifs. Cela implique une posture égaliatire du thérapeute avec son patient, que l'on retrouve dans d'autres TCC de troisième vague (comme l'ACT).
La MBCT, basée sur la pleine et la thérapie cognitive avance de plus l'hypothèse intrigante que "la thérapie cognitive marche, mais pas pour les raisons qu'elle croit", à savoir, c'est la distance qu'elle permet de créer d'avec les pensées dépressogènes qui serait thérapeutique, plus que leur remise en cause ou la mise en évidence des distorsions cognitives. La pleine conscience est une des méthodes les plus efficaces de créer cette distance en apprenant à observer ses pensées comme des pensées et à rester dans le moment présent sans se laisser accrocher par les jugements et les impulsions de ce que les maitres bouddhiques appellent 'notre esprit de signe'. A lire, et surtout à pratiquer, tant pour les thérapeutes que pour nos clients.

Benjamin Schoendorff
(image Odile Jacob)